Au cours des dernières décennies, les industries du divertissement ont testé de nombreux messages anti-piratage.
L’une des vidéos les plus emblématiques est sans aucun doute le « Vous ne voleriez pas une voiture», qui s’est avérée être un terreau fertile pour les mèmes, la satire et le ridicule.
La vidéo « You Wouldn’t » est un exemple extrême, mais les messages anti-piratage dans l’ensemble manquent souvent la cible. Ils ont tendance à exagérer les pertes, à se concentrer sur les menaces externes telles que les logiciels malveillants ou à peindre un avenir dystopique où les cinémas font faillite et tous les acteurs perdent leur emploi.
Ces types de messages peuvent bien fonctionner pour les hauts dirigeants d’Hollywood, mais ils n’ont pas d’impact sur la plupart des pirates occasionnels. Selon un nouvel article publié par l’ESSCA School of Management, il existe des informations comportementales clés qui expliquent les erreurs courantes dans les campagnes anti-piratage.
La papier titré; « Faire plus avec moins : informations comportementales pour les messages antipiratage », énumère trois erreurs courantes. Cela inclut la tendance des créateurs de campagne à empiler une combinaison d’arguments plus forts et plus faibles dans une seule campagne.
Plus n’est pas toujours mieux
L’hypothèse générale de beaucoup de gens est qu’en ajoutant plus d’arguments, le message sera plus convaincant. C’est ce qu’on appelle l’heuristique «plus c’est mieux», mais la recherche comportementale a montré que le contraire est souvent vrai.
Lorsque de nombreux arguments sont présentés ensemble, les plus forts peuvent en fait être dilués par les plus faibles. Ainsi, faire référence aux logiciels malveillants, aux amendes, à la mauvaise qualité, aux déconnexions Internet et aux pertes pour l’industrie, tout en associant le piratage au crime organisé, n’est pas la meilleure idée.
L’impact réduit des arguments plus forts et plus faibles est également l’une des raisons pour lesquelles la campagne « Vous ne voleriez pas une voiture » n’a pas fonctionné comme prévu, suggèrent les chercheurs.
« L’exemple le plus frappant pourrait être la (très) célèbre vidéo de sensibilisation « Vous ne voleriez pas une voiture » diffusée dans les cinémas et sur DVD dans le monde entier au cours des années 2000. Il comparait le téléchargement d’un film à diverses formes de vol, y compris des formes raisonnablement pertinentes (voler un DVD dans un magasin) et d’autres quelque peu absurdes (voler des sacs à main, des téléviseurs, des voitures), qui diluaient le message.
Chiffres et victimes
Les campagnes anti-piratage peuvent également trop se concentrer sur des chiffres secs sans les mettre en contexte. Bien que ces statistiques soient vitales pour l’industrie, le pirate moyen les passera simplement sous silence.
Cette « erreur » peut également s’expliquer par la psychologie comportementale, qui a montré que les gens s’identifient davantage à un problème ou à une victime s’ils ressentent une sorte de lien personnel. C’est souvent absent des messages anti-piratage.
Les chercheurs montrent un exemple de la campagne britannique « Get it Right from a Genuine Site » qui se concentre sur des statistiques arides sans touche personnelle. Le message se lit comme suit :
« Les industries de la propriété intellectuelle, comme le cinéma, la musique, la télévision et les logiciels informatiques, sont essentielles à la santé et à la stabilité de l’économie britannique. L’industrie créative du Royaume-Uni soutient environ 2,8 millions d’emplois au Royaume-Uni chaque année, contribue à environ 18 milliards de livres sterling aux exportations dans le monde et contribue à environ 10 millions de livres sterling par heure à l’économie britannique.
Il convient de noter que tous les messages personnels ne sont pas non plus efficaces. Le journal mentionne une Campagne anti-piratage indienne où des acteurs célèbres de Bollywood ont exhorté les gens à ne pas télécharger de films illégalement, assimilant le piratage au vol.
Cependant, le public indien a probablement peu de sympathie pour les « pertes » potentielles subies par ces acteurs multimillionnaires. En fait, la campagne anti-piratage peut être considérée comme une motivation supplémentaire pour pirater.
« Toutes les vidéos mettaient en vedette des acteurs bien connus, dont la valeur nette est estimée entre 22 et 400 millions de dollars, dans un pays où le revenu annuel par habitant est un peu inférieur à 2 000 dollars.
« Cela peut offrir aux pirates une justification morale : ils ne volent les riches que pour « nourrir les pauvres », une forme d' »effet Robin des Bois » qui prend encore plus de sens avec certains biens culturels ou sportifs », ajoutent les chercheurs.
N’insistez pas sur la popularité du piratage
Le piratage est un phénomène répandu et mondial. Cela le rend particulièrement problématique pour les détenteurs de droits d’auteur, mais mettre l’accent sur ce problème dans les messages anti-piratage n’est pas une bonne idée.
C’est la troisième erreur qui est soulignée dans l’article. En soulignant que les gens sont censés obtenir du contenu légalement tout en montrant que beaucoup de gens ne le font pas, les gens pourraient en fait être encouragés à pirater.
La recherche comportementale a montré que les gens préfèrent souvent suivre la norme descriptive (ce que les gens font) plutôt que l’injonctive (ce que la loi prescrit).
« Informer directement ou indirectement les individus que de nombreuses personnes piratent est contre-productif et encourage le piratage en poussant les individus ciblés à se comporter de la même manière. Ces messages fournissent aux pirates potentiels la rationalisation nécessaire en soulignant que « tout le monde le fait » », écrivent les chercheurs.
Nourriture pour la pensée
Dans l’ensemble, le document fournit beaucoup de matière à réflexion pour les militants anti-piratage. Le message général est d’accorder plus d’attention aux informations comportementales pour s’assurer que la messagerie fonctionne réellement.
Dans certains cas, les militants intègrent déjà ces connaissances, intentionnellement ou non. Cela peut conduire à des messages d’intérêt public subtils mais convaincants, comme nous l’avons souligné précédemment. La vidéo ci-dessous, en revanche, est moins susceptible d’avoir un impact.
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Citation complète : Gilles Grolleau & Luc Meunier (2022) Faire plus avec moins : informations comportementales pour les messages anti-piratage, La société de l’information, DOI : 10.1080/01972243.2022.2095683