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Depuis 2010, la France surveille et stocke des données sur des millions d’internautes dans le cadre d’un programme anti-piratage comprenant des lettres d’avertissement, des amendes et des déconnexions de FAI. La plus haute juridiction européenne décidera bientôt si le programme est autorisé en vertu du droit de l’UE. Les groupes de défense des droits numériques insistent sur le fait qu’en tant que système général de surveillance et de conservation des données, il viole les droits fondamentaux.

Clé Des PiratesLorsque le gouvernement français a formé une nouvelle agence anti-piratage appelée Hadopi, la mission était de perturber de manière significative BitTorrent et les réseaux de partage de fichiers peer-to-peer similaires.

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L’Hadopi a été pionnière du dispositif dit de « riposte graduée » qui consiste à surveiller les activités internet d’un partageur de fichiers et à faire suivre par un avertissement pour dissuader son comportement. Tout incident futur attire des réponses croissantes, y compris des amendes et des déconnexions Internet. Entre 2010 et 2020, l’Hadopi a émis 12,7 millions de mises en garde pour un coût pour les contribuables français de 82 millions d’euros.

L’effet du programme sur les taux de piratage globaux reste à débattre, mais selon les groupes français de défense des droits de l’internet, l’Hadopi ne se contente pas de prendre l’argent des citoyens. Lorsqu’elle surveille les activités Internet des citoyens, conserve d’énormes quantités de données, puis relie les identités aux adresses IP pour empêcher un comportement qui n’est pas un « crime grave », l’Hadopi viole les droits fondamentaux.

Protéger les droits

Malgré son autorisation dans le cadre de la nouvelle loi, le lancement officiel de l’agence Hadopi en 2009 s’est heurté à une forte opposition. Les partageurs de fichiers ont eu des problèmes avec le programme pour des raisons évidentes, mais pour le groupe des droits numériques La Quadrature du Netla surveillance massive d’Internet pour protéger les droits de copie s’est faite aux dépens du droit fondamental des citoyens à la vie privée.

L’opposition de La Quadrature au programme anti-piratage de l’Hadopi se concentre sur la loi conçue pour le soutenir. L’un des décrets d’application autorise la création de fichiers contenant les adresses IP des internautes ainsi que des données personnelles d’identification obtenues auprès de leurs fournisseurs d’accès à Internet.

Selon l’interprétation du droit de l’UE par le groupe des droits numériques, cela est illégal.

Contestation judiciaire en France

Avec le soutien de la Fédération des Fournisseurs d’Accès Internet Associatifs, du Réseau Informatique Français et de Franciliens.net, La Quadrature a déposé en 2019 un recours devant le Conseil d’État (Conseil d’État), demandant l’abrogation du décret autorisant le traitement des informations personnelles.

Le Conseil d’Etat a saisi le Conseil constitutionnel et sa suite décision a donné à La Quadrature l’impression que la position de l’Hadopi était intenable. De leur côté, la Hadopi et le gouvernement sont parvenus à la conclusion inverse.

La contestation judiciaire atteint la CJUE

Le Conseil d’Etat a entendu le pourvoi de La Quadrature puis a déféré des questions à la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) pour interprétation en vertu du droit de l’UE.

Les États membres de l’UE ne peuvent pas adopter de lois nationales qui autorisent la conservation générale et aveugle des données de trafic et de localisation. En tant que « mesure préventive » sur une base ciblée, la conservation des données de trafic et de localisation est autorisée, mais uniquement lorsque le but de la conservation des données est de lutter contre les « crimes graves ».

Dans CJUE, l’avocat général Szpunar avis non contraignant publié en octobre dernier, les frictions entre les droits à la vie privée et la capacité de faire respecter les droits d’auteur étaient pleinement visibles.

Hadopi vs droits fondamentaux

AG Szpunar a décrit l’accès de l’Hadopi aux données personnelles correspondant à une adresse IP comme une « atteinte grave aux droits fondamentaux ». Ces points de données peuvent ne pas être sensibles isolément, mais lorsqu’ils sont combinés, l’identité d’une personne se retrouve attachée à l’adresse IP et au contenu auquel elle a accédé derrière.

Cependant, à l’instar des affaires pénales où la conservation est autorisée lorsqu’une adresse IP est le seul moyen d’investigation, l’AG a conclu qu’il devrait en être de même dans le cas de l’Hadopi, « à moins d’accepter l’impunité générale pour les infractions commises exclusivement en ligne ».

Face à un avis qui reconnaît les difficultés rencontrées par les ayants droit mais se heurte à la jurisprudence, AG Szpunar a proposé « un réajustement de la jurisprudence de la Cour ». Cela garantirait que les titulaires de droits conservent la capacité de faire valoir leurs droits, lorsqu’une adresse IP est le seul moyen par lequel un contrefacteur peut être identifié (CJUE, pdf).

Le première audience dans le cas a eu lieu mardi avec un autre avis juridique attendu fin septembre 2023.

La CJUE devrait rendre son arrêt avant la fin de l’année.

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Berthe Lefurgey
Berthe Lefurgey est une journaliste chevronnée, passionnée par la technologie et l'innovation, qui fait actuellement ses armes en tant que rédactrice de premier plan pour TechTribune France. Avec une carrière de plus de dix ans dans le monde du journalisme technologique, Berthe s'est imposée comme une voix de confiance dans l'industrie. Pour en savoir plus sur elle, cliquez ici. Pour la contacter cliquez ici

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