Accueil > Recherche >

Une nouvelle étude sur les effets de la loi française anti-piratage Hadopi montre que son introduction n’a pas réussi à augmenter significativement les revenus du box-office. Cela a cependant provoqué un changement dans les préférences cinématographiques des gens. L’intérêt des cinéphiles pour les films américains s’est accru, au détriment d’autres contenus, dont les productions françaises.

Vegas EiffelLa France se bat en première ligne de lutte contre le piratage depuis plus d’une décennie maintenant.

Publicité

Le pays a été le premier à introduire un système de réponse graduelle, Hadopi, où les abonnés Internet risquaient de perdre leurs connexions Internet s’ils étaient surpris en train de partager des torrents à plusieurs reprises.

Ce programme anti-piratage élaboré a fourni une excellente occasion aux chercheurs d’étudier les effets sur la consommation légale. Au fil des ans, de nombreux articles ont été publiés, documentant à la fois les effets positifs et négatifs.

Récemment, une nouvelle étude a été ajoutée au mélange qui examine l’effet de la loi des trois coups sur les visites au cinéma. Les chercheurs examinent spécifiquement les effets de la période précoce d’Hadopi. Cela fait des années maintenant, mais l’usine à papier académique se déplace lentement.

L’article, publié dans la revue à comité de lecture Information Systems Research, montre que la loi anti-piratage n’a pas augmenté les recettes globales du box-office. Cependant, cela a eu un effet sur le type de films que les gens choisissaient.

Hadopi a augmenté sa part de marché des films américains

«Nous montrons que, suite à l’introduction de la loi Hadopi, la part de marché des films américains a augmenté de 9% au détriment des autres films», explique Christophe Bellégo, professeur assistant en économie à l’ENSAE et auteur principal de l’article.

Cette augmentation de part de marché se fait au détriment d’autres films, y compris français, car les dépenses globales en billets de guichet restent relativement stables. Les chercheurs s’attendent à ce que cette augmentation du nombre de films américains s’explique par la conviction que ceux-ci sont plus risqués à pirater.

«Sans loi anti-piratage, certaines personnes consomment illégalement des films américains en ligne et regardent légalement des films nationaux dans les salles de cinéma parce que des copies illégales de films américains sont facilement disponibles sur Internet pendant leur exposition en salles. C’est beaucoup moins le cas pour les autres films », nous dit Bellégo.

Bien que l’on puisse penser que le nombre total de visites au cinéma augmenterait, ce n’est pas le cas. Selon les chercheurs, cela peut s’expliquer par le fait que les gens ont peu de temps et d’argent.

Aucune augmentation globale des revenus

Les résultats ne sont pas très encourageants pour l’industrie cinématographique française. Au lieu d’augmenter les revenus, la fréquentation des films français a chuté. Cependant, les chercheurs ne veulent pas conclure que les mesures des trois coups ont échoué. Ils ont simplement changé les habitudes de consommation.

« [The effects are] clairement non conforme à la politique culturelle française visant à soutenir la production de films nationaux et la diversité culturelle. Cependant, selon l’objectif ultime du gouvernement, soutenir une concurrence loyale ou soutenir la production culturelle nationale, la politique est plus ou moins efficace.

En d’autres termes, Hadopi a corrigé les modes de consommation légale en faveur de l’industrie cinématographique américaine, qui reflète plus fidèlement la vraie demande des gens. Du moins, quand il s’agit de visites de cinémas.

Limites

Il y a bien sûr certaines limites à l’étude. La période de recherche est limitée à la période comprise entre 2008 et 2011 lorsque Hadopi a démarré. Il est probable que ces effets se sont dissipés avec le temps. De même, les chercheurs n’ont examiné que le marché du théâtre. D’autres sources de revenus, telles que les ventes de DVD et de Blu-ray, n’ont pas été prises en compte.

Cela dit, il est clair que les mesures anti-piratage affectent différents types de contenu de différentes manières. Pour certains, c’est positif, et pour d’autres, ce n’est clairement pas le cas.

«Comme dans de nombreux autres domaines, les effets des politiques sont complexes. Ils conduisent souvent à des effets redistributifs là où il y a des gagnants et des perdants. C’est un peu comme s’asseoir sur un lit à eau. Votre poids déplace de l’eau ailleurs, mais le volume total est le même », nous dit Bellégo.

«Comprendre les effets asymétriques a des implications importantes pour les entreprises dont les bénéfices peuvent être affectés par la législation de lutte contre le piratage ainsi que pour les gouvernements pour la conception de leur politique», ajoute-t-il.

L’article de Christophe Bellégo et Romain De Nijs, intitulé «Les conséquences involontaires des lois antipiratage sur les marchés à piraterie asymétrique: le cas de l’industrie cinématographique française», est disponible ici (paywall). Une pré-impression gratuite peut être trouvée sur SSRN.

Rate this post
Publicité
Article précédentUn procès en Alabama frappe Apple et Google pour des jeux de hasard
Article suivantAcheter un iPhone 12? Voici comment empêcher la 5G de tuer votre batterie
Berthe Lefurgey
Berthe Lefurgey est une journaliste chevronnée, passionnée par la technologie et l'innovation, qui fait actuellement ses armes en tant que rédactrice de premier plan pour TechTribune France. Avec une carrière de plus de dix ans dans le monde du journalisme technologique, Berthe s'est imposée comme une voix de confiance dans l'industrie. Pour en savoir plus sur elle, cliquez ici. Pour la contacter cliquez ici

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici