Cillian Murphy, vêtu d’un sweat à capuche noir et d’un manteau épais, est projeté sur un écran géant dans le hall central caverneux de Manchester. Par une nuit sombre et blanche, il se promène dans les rues de la ville, confessant tout ce qu’il regrette. Autour de nous, l’espace est sombre et vibrant, des faisceaux de lumière bleue balayant et aveuglant. Toute la pièce grésille. Lugubre et électrique, cette nouvelle installation cinématographique, une collaboration entre Murphy et l’écrivain Max Porter, est d’une intensité exquise.
Dans les tunnels dégoulinants, les parkings et les routes abandonnées, Murphy joue avec un désespoir écarquillé. Ses excuses sont vastes et dites sans apitoiement sur soi. Certains drôles, certains tristes, ils englobent la violence et les échecs des générations précédentes. Sous une pluie torrentielle, les mots de son personnage sans nom crachent, se purgent, cherchent une issue.
La prose de Porter est visiblement étrange et belle. Ses romans ont joué avec le fonctionnement du son sur la page. Ici, vous pouvez ressentir le plaisir d’écrire pour être lu à haute voix. Travaillant sous le barrage de regrets et d’opportunités manquées de Murphy, le score de Jon Hopkins, Aaron Dessner et Bryce Dessner est sublime. Avec des couches binaurales de piano expansif et de synthés haletants, le paysage sonore puissant et percutant donne l’impression de se frayer un chemin à l’intérieur de vous.
La mise en scène d’Aoife McArdle tire le meilleur parti des paysages variés de la ville, créant des cadres en béton brut et éclairant les foulées de Murphy par l’éclat des vitrines des friteries. Chaque plan exprime la solitude de la ville. Les mots passent de la culpabilité due aux gens, à la honte qui entoure le monde naturel : les petites façons dont nous causons la ruine.
Intense et englobant, la pièce ne semble jamais trop dramatique ou hypocrite. Son sentiment de désespoir s’accompagne d’une célébration glorieuse et silencieuse de l’ordinaire, du régulier, du tenu pour acquis. Cet homme ne demande pas pardon, mais dans l’acte de confession, quelque chose change. Le ciel passe du noir lourd au jaune trouble. La musique et les lumières qui nous entourent s’adoucissent. Les plans s’échappent des rues encaissées et trouvent un espace vert ouvert.
Vers la fin, alors que Murphy se déplace dans un champ détrempé, les bottes s’étouffant, un murmure d’oiseaux fond derrière lui. Le ciel s’éclaircit et son allure s’arrête. Ce n’est pas seulement un film, mais un exorcisme. – Gardien
Tout ce temps irréel est disponible pour regarder en ligne, dans le cadre du Festival International de Manchester