Il y a quelques jours à peine, il semblait que Huawei était en bonne forme pour une entreprise qui a dû faire face à des années de sanctions américaines. Bien que Huawei ait enregistré une baisse de ses revenus d’environ 29 % l’année dernière, il annoncé récemment des gains nets records d’environ 17,8 milliards de dollars et récompensé ses actionnaires— dans le cas de Huawei, ses employés — avec des dividendes sains de 9,65 milliards de dollars.

Les nouvelles financières encourageantes ont coïncidé avec la première apparition publique de la dirigeante Meng Wanzhou – fille du fondateur et PDG de Huawei, Ren Zhengfei – depuis son retour en Chine après sa libération de sa garde à vue au Canada. Cependant, de nouvelles inquiétudes ont surgi pour le géant des télécoms, comme le magazine économique français Défis récemment signalé que la filiale de Huawei dans le pays est désormais fermement dans le collimateur des procureurs parisiens pour des malversations financières présumées. C’est une pilule particulièrement amère à avaler pour le bureau français de Huawei, après avoir passé des années à courtiser l’élite politique française.

Filiale française sous surveillance

Pendant des années, les problèmes de Huawei se sont concentrés aux États-Unis, la Maison Blanche mettant l’entreprise sous un projecteur particulier. Le dernier vent contraire vient cependant de France, où il a été récemment révélé que le parquet de Nanterre avait demandé aux procureurs de la capitale d’enquêter sur la filiale française de Huawei. L’enquête fait suite à un rapport de janvier 2021 de l’Agence française de lutte contre la corruption, qui a soulevé soupçons sur la fraude fiscale et l’abus de biens sociaux.

En effet, bien que Paris n’ait pas historiquement partagé l’opposition vocale de Washington à Huawei, les responsables français se méfient du géant chinois des télécoms depuis des années. En 2015, l’union inédite de cinq ministères français en 2015 créé ‘Cerberus’, qui était chargé d’examiner les relations de Huawei avec le monde universitaire et scientifique français. Dans son sillage, le gouvernement demande discrètement à Télécom Paris et au Commissariat à l’énergie atomique (CEA) de couper les ponts avec l’entreprise.

Revers majeur pour les efforts de lobbying

Bien qu’ils n’aient pas encore commenté les enquêtes récemment révélées, le bureau français de Huawei est susceptible d’appréhender cette attention indésirable. C’est compréhensible, étant donné que l’entreprise a consacré beaucoup de temps et de ressources dans le recrutement de personnalités de la politique française. Certains d’entre eux, comme Henri Soupa et Clémence Rouquette, quittent leurs fonctions en l’espace d’un an. Le premier affirme que sa sortie est survenue après une crise de conscience liée à son association avec l’entreprise, tandis que la seconde refuse de parler de son passage à la masse salariale de Huawei.

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Néanmoins, de nombreuses autres personnalités du monde politique français continuent de battre le tambour pour Huawei. En effet, il semble que la filiale française ait dépensé jusqu’à un demi-million d’euros pour promouvoir ses intérêts dans le pays en 2019 ; c’est à peu près le même montant que la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) et plus que les géants de l’automobile Peugeot. Ces fonds ont été acheminés dans les poches des décideurs politiques actuels et anciens, en échange de leur écoute et de l’accès à leurs importantes sphères d’influence.

D’autres tentatives pour s’insinuer dans le tissu de la société française incluent la faire des cadeaux de 240 caméras CCTV (d’une valeur cumulée de 2 millions de dollars) à Valenciennes en 2017 ; la établissement d’une usine de recherche et développement au cœur de la souveraineté et de la décision française en 2020 ; et le annonce de la première usine de production de Huawei hors de Chine en Alsace en 2021. Alors que la première initiative a finalement échoué et relève désormais de l’enquête de Cerberus, les deux dernières ont été des jeux de pouvoir audacieux et efficaces pour clarifier les intentions de l’entreprise.

Huawei France remet-il en cause les aspirations européennes de l’entreprise ?

Après avoir consacré tant d’efforts et de dépenses pour rallier le gouvernement français, Huawei sera sûrement contrarié d’apprendre que leurs plans pourraient échouer. Pendant des années, l’objectif ultime a été une rencontre avec Emmanuel Macron, de préférence remplie d’une séance photo de prune pour ajouter un placage de légitimité bien nécessaire aux relations françaises de Huawei. Maintenant, il semble qu’ils puissent simplement être convoqués par le parquet du pays plutôt que par son président.

Il s’agit d’un revirement de situation marqué par rapport à il y a seulement deux semaines, lorsqu’il semblait que la société avait réussi un exploit remarquable en se soustrayant aux sanctions américaines pour afficher des bénéfices records. Mais s’il a peut-être réussi à contourner un embargo sur le sol américain, vers qui Huawei se tournera-t-il s’il se heurte à une hostilité similaire au cœur de sa stratégie d’expansion européenne ? Bien sûr, l’enquête n’en est qu’à ses débuts et il est certainement possible que l’intérêt de la justice française pour Huawei s’éteigne, mais l’avenir de l’entreprise sur les côtes européennes semble bien plus inquiétant qu’il y a à peine quinze jours.

Image: Karlis Dambrans, Flickr, Licence Creative Commons 2.0.

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