Dans le sud de la France, à environ 45 minutes de route au nord-est d’Avignon, après Carpentras avec ses remparts médiévaux et son supermarché géant son marché de consommation le vendredi, il y a un petit village pittoresque appelé Le Barroux, entassé sur une colline au bord de la plaine du Rhône et surmonté d’un gros château couleur sable, le tout dans un style provençal classique. Derrière le village, surplombant les collines broussailleuses et les plateaux silencieux et le vaste tablier de plaine fertile et animée, se dresse le sommet solitaire et lunaire du Mont Ventoux : étape redoutée du Tour de France, géant de Provence, annonciateur solitaire des rangs massés des Alpes à l’est.
Dans le village il y a une maison avec un verger d’oliviers et d’abricotiers. Il a été transformé en grange à la fin des années 60 par mon grand-père, un architecte genevois. Il appartient toujours à ma mère et à ses sœurs. J’y suis en vacances depuis ma naissance (je porte le nom des oliviers) ; J’ai fait une visite dans plus de la moitié des quarante dernières années. Mais pas depuis 2018, parce que j’ai eu un bébé et puis tu sais ce qui s’est passé. Peut être l’année prochaine. Mais ma mère et mes tantes ne rajeunissent pas, et la diaspora des cousins est éloignée et dispersée, et l’endroit devient de plus en plus difficile à utiliser et à entretenir avec chaque saison qui passe. Je sens que le temps passe dessus.
Ainsi, lorsque, inspiré par la question de Bertie, j’ai finalement lancé Microsoft Flight Simulator pour la première fois cette semaine, j’ai su qu’il n’y avait qu’un seul endroit que je voulais voir.
Mon Cessna est monté de l’aérodrome d’Avignon et a rampé patiemment sur un treillis de bourgs, de vignobles et de parcs d’activités vers le Ventoux. La navigation est facile lorsqu’une montagne d’un kilomètre de haut domine tout le paysage. A sa gauche, se prolongeant vers moi, les dents de calcaire dentelées des Dentelles de Montmirail ; Je connaissais la fente dans cette chaîne de contreforts où devait se trouver le village. Il y avait Caromb, le village voisin avec le bon vin disponible pas cher tout droit du vignoble. J’ai modifié mon parcours vers la gauche. Il y avait la splodge bleu vif du lac du Paty, un lieu de baignade haut dans les collines ; et il y avait le D938 qui serpentait le long du fond de la vallée ; et il y avait Le Barroux lui-même, une forme indubitable même sans la silhouette distinctive de son château (peut-être que c’est dans la mise à jour mondiale qui est toujours en téléchargement) ; et là le petit carré de verdure que doit être le verger ; et là, le petit cube de la maison soigneusement rangé dans le coin du verger.
Mon cœur s’emballa. C’est une merveille banale de nos jours, vraiment – c’est juste une version sophistiquée de Google Maps – mais cela a tout de même un impact émotionnel. C’est peut-être la façon dont le paysage prend vie à partir de ce point de vue, suspendu quelque part entre le regard objectif et aplati du satellite et la carte subjective construite dans les chemins de votre mémoire. D’une certaine manière, c’est plus qu’une carte. C’est un paysage que l’on connaît par cœur, par instinct. Vous ne reconnaissez pas seulement à quoi cela ressemble, mais ce que vous ressentez. Vous connaissez ses humeurs.
Après avoir vu le village, j’ai décidé de prendre mon Cessna sur le sommet chauve du Ventoux. Mais c’était mon premier vol et je ne savais pas ce que je faisais. Je n’ai pas grimpé assez vite, et puis, alors que les flancs d’un vert profond de la montagne s’élevaient à ma rencontre, j’ai grimpé trop vite ; l’IA a dû prendre le relais pour éviter un décrochage. Le petit Cessna travaillait, mais il n’allait pas y arriver. Comme tant d’autres avant moi, je suis venu rogner sur les pentes du Mont Ventoux, ayant sous-estimé le géant de Provence.