Lien source

Pierre Goldman (Arieh Worthalter) dans « Le Procès Goldman », de Cédric Kahn.
Pierre Goldman (Arieh Worthalter) dans « Le Procès Goldman », de Cédric Kahn.

L’AVIS DU « MONDE » – À NE PAS MANQUER

Des gangsters qui sont en même temps de grands intellectuels, il n’y en a pas beaucoup. Si l’histoire retient – ​​toutes proportions gardées – le cas de Lacenaire, le dernier film de Cédric Kahn nous rappelle l’existence de Pierre Goldman à travers la captivante reconstitution de son deuxième procès. Présenté en ouverture de la Quinzaine des cinéastes au Festival de Cannes, en mai, le long-métrage s’inscrit dans le sillage de deux autres films de prétoire français récent, dont les prévenus ont le chic de présenter tous les traits de l’homme ou de la femme à anéantir : tout ce que l’ordinaire tient en horreur et que l’extraordinaire est susceptible de chérir. La résurgence d’un cinéma de procès est sans doute le signe d’une société qui requalifie l’histoire du point de vue des minorités.

Lire l’entretien avec Cédric Kahn : Article réservé à nos abonnés « Pierre Goldman est un personnage de cinéma »

DansSaint-Omerd’Alice Diop (Grand Prix du jury et Prix du premier film, à la Mostra de Venise, en 2022), l’audition d’une mère infanticide et femme de lettres d’origine sénégalaise avec en lumière les préjugés racistes, quand Anatomie d’une chute (Palme d’or au Festival de Cannes, en mai), de Justine Triet, décrit la suspicion engendrée par le mode de vie d’une écrivaine à succès, après la mort de son mari, tombée d’un grenier.

Pierre Goldman, lui, était le fils de résistants juifs d’origine polonaise. Un juif entouré de Noirs qui rêvait que ses enfants « Soyez des juifs au sang nègre ». La police le répugnait. Militant d’extrême gauche, il s’est rendu à Cuba avant de rejoindre un petit groupe de maquisards au Venezuela. De retour en France, poursuivi pour une série de braquages ​​à main armée, dont un ayant entraîné la mort de deux pharmaciennes, le 19 décembre 1969, boulevard Richard-Lenoir, à Paris, il a été condamné en première instance à la réclusion criminelle à perpétuité.

Publicité

En prison, il a clmé son innocence et a tenté d’éclairer le mystère de sa vie dans un livre, Souvenirs obscurs d’un juif polonais né en France (Seuil, 1975). La gauche de l’époque – fascinée par la beauté de sa langue, sa révolte et son argumentaire – et des célébrités, de Régis Debray à Simone Signoret, se sont réunies autour de lui des comités de soutien. Ajoutons, pour ceux que les mondanités ne choquent pas, qu’il était aussi le demi-frère de Jean-Jacques Goldman qui, au sein du groupe Taï Phong, connut son premier succès à la même période, avec le slow d’été Sœur Jeanne.

Prodigieux face-à-face

C’est dans ce climat fébrile que débute, en novembre 1975, son deuxième procès, objet tout entier du film. Il fut son moment de grâce et sa dernière gloire. De fait, la tâche de restitution était ardue. Après coup, comment retrouver l’alchimie de cette épiphanie ? De la même manière que Pierre Goldman projetait de se « présenter avec [sa] seule innocence », sans utiliser au moindre témoin pour sa défense, Cédric Kahn a effacé l’aspect théâtral de la cour pour y tisser une étoffe autrement plus drue. En utilisant un format carré, en coupant la musique et en se passant de flash-back, il nous donne l’impression de plonger dans des archives. A moins que ce ne soit dans un guet-apens… Une fois entrée dans le tribunal, nous n’en sortirons plus.

Il vous reste 28,95% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

4.8/5 - (36 votes)
Publicité
Article précédentPUBG : BATTLEGROUNDS x Prime Gaming – ÉVÉNEMENT
Article suivantLies of P DLC confirmé par l’offre d’emploi comme « prévu pour la production »

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici